Une balade à travers les âges : le Paris d’Hugo et de Zola

« À Paris, j’ai sous les yeux les cinq mille hectares du monde où il a été le plus pensé, le plus parlé, le plus écrit » écrivait Jean Giraudoux.

Nous aimons nous balader dans la capitale, nous perdre dans chaque ruelle en imaginant à quoi ressemblait la ville Lumière des siècles plus tôt… l’occasion d’insuffler un peu de magie et d’histoire dans nos flâneries n’est jamais loin !  Suivez le guide, nous vous emmenons dans le Paris d’il y a deux siècles, celui qui a inspiré deux auteurs phares de la littérature française : Victor Hugo et Émile Zola.

Le haut des Halles, l’ancienne Cour des Miracles

Nous débutons notre balade près de Réaumur-Sébastopol, dans ce qui fut un fameux repère de vide-goussets et de mauvaises gens : la Cour des Miracles. Sous l’Ancien Régime, les Cours des Miracles étaient des espaces de non-droit : on les surnommait ainsi car les prétendues infirmités des mendiants y disparaissaient “comme par miracle” dès la nuit tombée. Paris en comptait une douzaine mais la plus importante était située au carrefour de la rue du Caire, la rue des Forges, l’impasse de la Corderie, la rue Thévenot, la rue de Damiette et la rue Réaumur.

Cette Grande Cour des Miracles fut décrite par Victor Hugo dans Notre-Dame-de-Paris en ces termes : “C’était une vaste place, irrégulière et mal pavée, comme toutes les places de Paris alors. Des feux, autour desquels fourmillaient des groupes étranges, y brillaient çà et là. Tout cela allait, venait, criait”. C’est ici qu’Esméralda sauve le poète Pierre Gringoire de la pendaison en l’épousant pour trois ans.

 

©La Cour des Miracles, illustration de Gustave Doré pour le roman Notre Dame de Paris de Victor Hugo 1860

 

Initialement installée au pied de l’enceinte de Charles V (rue de Cléry), une des sept grandes enceintes ayant entouré Paris, vous pouvez encore deviner la célèbre Cour des Miracles d’Hugo en parcourant la rue de Damiette et la rue des Forges. Marchez dans les pas d’Esméralda en empruntant la rue du Nil : c’était l’un des passages qui conduisait à une des faces les plus sombres de la capitale…

Station Vélib’ : Station n°2017, Caire – Dussoubs

 

Châtelet – Les Halles, marché à ciel ouvert et lieu de révolte

Continuons donc notre promenade littéraire à Châtelet, dans le cœur de Paris !

Ses fameuses “Halles” existent depuis 1137 : marchés de vente en gros de produits alimentaires frais, les Parisiens s’y sont toujours rendus pour y faire leurs emplettes (fromage, viande, poisson, blés et farines…).

Le quartier étant en permanence en ébullition, la construction d’une Halle au blé, accessible depuis les bords de Seine, fut actée en 1763 et prit place sur les anciennes terres de l’Hôtel de Soisson. Pour retrouver la trace de cette ancienne Halle au blé, rendez-vous au 2 Rue de Viarmes, où siège désormais la Bourse de Commerce.

Bien des années plus tard, en 1852, l’architecte Victor Baltard met en œuvre la construction de pavillons en verre et en métal, en forme de parapluie, ayant chacun sa spécificité (qui la volaille, qui la marée…). Ces derniers étaient séparés en deux groupes par une rue centrale, qui démarrait au pied de l’église Saint-Eustache et est plus connue aujourd’hui sous le nom de l’Allée André Breton.

 

©Editions André Leconte, Paris – Les Halles – Un Pavillon., entre 1890 et 1920, Musée Carnavalet Histoire de Paris

 

Grâce à Emile Zola, on peut encore imaginer l’ambiance particulière qui y régnait à la fin du XIXème siècle “La grande voix des Halles grondait plus haut ; par instants, des volées de cloche, dans un pavillon éloigné, coupaient cette clameur roulante et montante. Ils entrèrent sous une des rues couvertes, entre le pavillon de la marée et le pavillon de la volaille” (extrait du roman Le Ventre de Paris).

Lieu incontournable de l’histoire de France, Châtelet fut à l’épicentre des affrontements qui animèrent l’insurrection républicaine de juin 1832 dont le but était de renverser la monarchie de Juillet. Les républicains combattent, en plein cœur du Châtelet, les soldats du roi et les gardes nationaux, venus rétablir l’ordre. C’est sur la barricade située rue de la Chanvrerie que meurt Gavroche, enfant des rues, dans Les Misérables.

Si la rue de la Chanvrerie a été absorbée par la rue Rambuteau en 1838, vous pouvez encore imaginer cette ancienne barricade au croisement de la rue Saint-Denis et la rue Mondétour… La scène de révolte se termine par le sauvetage de Marius grâce à Jean Valjean dans le cabaret de Corinthe, aujourd’hui disparu mais initialement situé au 102 rue Rambuteau.

Station Vélib’ : Station n°1008, Les Halles – Saint-Eustache

 

Notre-Dame-de-Paris, sauvée par Victor Hugo

Flânons encore un peu dans les parages. Qu’apercevons-nous en face de Châtelet ? Notre-Dame qui se dresse, aussi majestueuse qu’on la décrit dans de nombreux ouvrages de la littérature française. En effet, ce projet titanesque commencé sous l’impulsion de l’évêque Maurice de Sully en 1163, est achevé seulement en 1345.

 

©Dessin de François Chifflart, Attaque de Notre-Dame, entre 1890 et 1920, illustration du roman de Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, maison de Victor Hugo, vers 1876-1877

 

Quelques siècles plus tard, c’est Victor Hugo qui sauva le monument en mettant en lumière dans son œuvre l’état de délabrement dans lequel il se trouvait ce qui eut pour effet de lancer un concours d’architecture pour débuter sa rénovation.

Aujourd’hui on peut encore imaginer les ombres de Quasimodo et Esmeralda derrière ces murs ancestraux. Ces derniers nous toisent malgré la funeste réalisation, au printemps 2019, de la vision d’Hugo : “Tous les yeux s’étaient levés vers le haut de l’église. Ce qu’ils voyaient était extraordinaire. Sur le sommet de la galerie la plus élevée, plus haut que la rosace centrale, il y avait une grande flamme qui montait entre les deux clochers avec des tourbillons d’étincelles, une grande flamme désordonnée et furieuse dont le vent emportait par moments un lambeau dans la fumée. Au-dessous de cette flamme, au-dessous de la sombre balustrade à trèfles de braise, deux gouttières en gueules de monstres vomissaient sans relâche cette pluie ardente qui détachait son ruissellement argenté sur les ténèbres de la façade inférieure.

Une description presque prémonitoire.

Station Vélib’ : Station n°4003, Quai aux Fleurs – Pont Saint-Louis

 

Si vous aimez la littérature, l’application Emile vous aidera à découvrir Paris dans les yeux de vos écrivains préférés. Des extraits de romans sont disponibles en fonction des lieux et vous pouvez vous-même contribuer en y ajoutant les extraits de livres vous ayant marqués.